Le bâillon est une sorte de muselière en fer avec des lanières de cuir destinée à entraver la bouche des esclaves. Ils sont peu répandus, c’est Vallentin qui les a fait connaître au Balisier, après les avoir fait forger sur place.
Le Président.
Le commandeur ne mettait-il pas parfois des bâillons à certains nègres de l’habitation ?
François, ancien esclave de Sébastien.
Oui, monsieur, à tous ceux qui faisaient des bêtises, par exemple ceux qui cassaient les cannes. C’est M. Vallentin qui a fait mettre les bâillons dans l’habitation. Il n’y en avait pas avant lui, mais les nègres étaient trop mauvais.
Les esclaves déclarent l’avoir gardé entre 1 et 7 jours, parfois nuit et jour. Cela suggère qu’ils pouvaient à peine manger ou boire pendant cette longue période.
Le président.
Louis vous a-t-il déjà mis le bâillon?
François.
Oui, parce que j’avais pris quatre cannes, j’avais faim. Je l’ai porté pendant une semaine. On me le laissait la nuit. On a aussi mis le bâillon à St-Jean, Rémi, Félix et Etienne, pour les punir d’avoir volé du maïs, des pommes de terre ou des ignames, ou d’avoir mangé des cannes.
Mercure.
Les bâillons étaient faits comme des mors à cheval et faisaient un peu mal. Mais les nègres qui les portaient étaient humiliés. Ils avaient honte et les autres nègres riaient.
Jammes, assesseur.
Mercure, quand un esclave a mérité une punition, dites-nous s’il n’aime pas mieux porter le bâillon que de recevoir 4 pieux, 29 coups de fouet ?
Mercure.
Ah ! Monsieur, il préfère le bâillon.
Jammes, assesseur.
C’est une atténuation des peines correctionnelles.
Voici la ligne de défense de Vallentin : présenter le bâillon comme une mesure de clémence. Mieux encore, comme un instrument thérapeutique contre une étrange maladie.
Vallentin.
J’ai fait forger 2 de ces baîllons, pour les mettre à mes Nègres mangeurs de terre